Ecole du Dehors,  Ecole et Transitions

Ecole du dehors : “Je t’embarque avec moi !”

[RENCONTRE] une série de portraits et de retour d’expériences pour apporter toute la lumière aux belles initiatives des Profs en transition d’ici et d’ailleurs.

Aujourd’hui, gagnons la Wallonie et l’une de ses écoles publiques rurales, école où enseigne auprès des plus petits, Peggy D., école aux murs de briques rouges que notre collègue connaît très bien car c’était celle de son enfance…

Alors, Peggy, c’est quoi ton histoire ?

C’est au milieu des années 90 que Peggy quitte à chaudes larmes cette petite école rurale pour rejoindre le collège. Fini le jardin partagé, le potager, le poney et les poulets que ramenait son institutrice d’alors. Place à la « vraie » classe, assise à longueur de journée, où Peggy subit et s’efface. Pour celle issue d’un milieu rural, qui n’utilise que vélo et transports en commun, ses parents n’ayant pas de voiture, dur de laisser dans le rétroviseur ces belles années d’épanouissement. Alors, Peggy s’accroche, devient elle-même enseignante et parviendra après dix ans de postes divers à retrouver les bancs de sa petite école, côté maîtresse cette fois.
L’ancienne instit, qui aimait faire classe dehors, est partie à la retraite et c’est Peggy qui prend la relève. Elle reprend le flambeau de son aînée cherchant à donner plus encore à cette école du dehors toute sa légitimité et sa juste place pédagogique dans le cadre actuel.

« J’aime ce que tu fais »

Les mots de sa maîtresse touchent Peggy, la passation est faite, naturelle. Reste à pouvoir s’exprimer pleinement dans un système hiérarchique où tout doit être cadré, contrôlé et évalué. Mais voilà le hic avec l’école du dehors, du moins au début : comment savoir à l’avance quelle compétence sera travaillée ? L’extérieur n’a rien d’une science exacte et l’alchimie de cette pratique réside dans la rencontre à l’instant de la sortie entre les enfants et le milieu qui les accueille. Alors, Peggy cherche, tâtonne, expérimente et apprend ; les mois et les années passent apportant avec eux plus de confiance et d’assurance.

Et un jour, le déclic

En 2018, Peggy reçoit la liste des formations accessibles. Parmi elles, « l’école du dehors », avec cette précision « apportez de bonnes chaussures et des vêtements en conséquence ». Ces mots parlent à Peggy en recherche de pragmatisme et d’expériences à partager. Au centre, le feu – allumé au briquet, petite déception pour Peggy qui se voyait bien l’allumer avec les pierres – puis les quatre chaises du cercle intérieur de parole, enfin, le large cercle extérieur d’écoute. Et sur les quatre jours de formation, deux jours à l’automne et deux autres au printemps, se succèdent les inquiétudes, les rires, les hésitations, bref les échanges qui donnent envie d’avancer ensemble. Peggy se souvient avec émotion de sa rencontre avec Marie-Laurence Jadot, enseignante et formatrice, qui trouve les mots justes, ceux qui résonnent en Peggy et lui font venir les larmes qui libèrent. Apprendre à lâcher prise, vivre l’instant et adapter les apprentissages et les compétences au milieu naturel, voilà des pistes de réflexion à mettre en œuvre !

“Je t’embarque avec moi !”

De retour à son école, Peggy assume ses choix et explique le fonctionnement qu’elle souhaite instaurer auprès de ses collègues et de sa directrice qui, devant sa détermination et sa confiance ravivée, la soutiennent. Ce sera donc « l’école du dehors » pour sa vingtaine de petits élèves : dans la cour de l’école dès que possible et dans les bois une fois par mois. Il faut dire qu’avec une mare, un potager, des poules, un coq et une cabane en branches de saule, la cour de l’école est un lieu agréable pour découvrir des livres, chanter, planter et observer! Un cadre de choix, pour qui veut émerveiller ses élèves à la nature, construit patiemment à l’aide du programme belge « Ose le vert » et de l’engagement bénévole de toutes celles et ceux qui y croient, enfants, parents et enseignants. « Impliquer les enfants à la réalisation leur donne le sens de l’effort, la satisfaction du travail accompli et le respect du lieu qu’ils ont participé à construire ». Au quotidien, dès que Peggy sent monter le stress et l’agitation dans sa classe, elle en ouvre les portes… à la plus grande joie de ses jeunes élèves ! Et la pression redescend aussi vite… Aujourd’hui, Peggy est aidée par une jeune puéricultrice et l’enseignante a posé le cadre d’emblée : « Je t’embarque avec moi, j’espère que cela va te plaire ! ». Direction le bois, les interrogations et hésitations de sa jeune collègue laissent très vite place au plaisir de vivre ces moments : « Ecoute, il n’y a pas de bruit, pas de stress… On est super bien ! ».

« T’es bien quand t’es dehors avec eux ! »

Et oui car les élèves ont pris l’habitude de cette sortie, ils l’attendent avec impatience et se réveillent avant le réveil. Motivés le matin et apaisés le soir ! Et pourtant au début, rien n’était gagné. Aux premières sorties, son lot d’inquiétudes pour les élèves peu habitués à ce décor… Les « qu’est-ce-qu’on fait Madame ? » reçoivent en écho des « ce que vous voulez ! » non habituels qui déroutent puis ouvrent des perspectives infinies… Sauter, courir, creuser, construire, collectionner, chercher… et trouver des trésors, champignons, branches tordues, cailloux de couleur, glands, etc. La nature devient émerveillement de tous les instants et chacun trouve sa place. Peggy accepte et encourage ce jeu libre : « perdre du temps pour en gagner » ! Vient alors selon le contexte le temps des apprentissages, des chiffres et lettres à écrire avec les bâtons, des collections à constituer et comparer, des ficelles à mesurer, etc. L’ici et maintenant du pédagogue qui répond au désir immédiat de compréhension, de jeu et d’intérêt de son apprenant car il s ‘agit « de voir l’utilité des choses avant d’apprendre ».

Quelques conseils avant de se quitter…

Selon Peggy, l’une des clés de réussite de l’école du dehors consiste notamment à rassurer les parents. Et pour cela, sa technique est de communiquer un maximum : impliquer les parents dès la réunion de rentrée, les associer aux sorties, envoyer des photos et vidéos pendant et après. Parents et enfants sont ravis : il est envisagé d’augmenter la fréquence des sorties !

Pour tous les collègues désireux de se lancer dans cette magnifique (et irréversible) aventure, quelques conseils que nous donnent Peggy : ne pas avoir peur de démarrer, commencer par des sorties courtes en étant bien accompagné et surtout faire confiance aux enfants ! Et le livre « Trésors du dehors » téléchargeable gratuitement sur le site de Tous dehors.

Cet article vous a plu ? N’hésitez pas à consulter nos articles autour de l’école du dehors et des cours de récréation en transition ainsi qu’à rejoindre la belle aventure des Profs en transition !

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2 commentaires

  • Bastin Isabelle

    Nous pratiquons depuis 6 ans l’école dehors dans une petite école rurale avec les 6 années primaires et 3 années maternelles . Nous sommes 4 ( 4 classes) nous aimerions partager notre expérience . De magnifiques réussites avec des enfants de tous les milieux .
    C’est à Walk , province de Liège , Belgique

  • Karine

    Merci pour ce témoignage rassurant quand on a envie de se lancer ! Merci pour la référence de livre ! Je prépare avec certes de l’avance tout cela pour la rentrée prochaine ! J’en rêve la nuit !!!

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