Un composteur à l’école
Temps de lecture : 7 minutes
[Ecole Zéro Déchet] est une initiative lancée par le réseau Profs en transition de façon à agir ensemble pour limiter les déchets dans et autour de nos écoles. Réfléchissons, collectons, analysons et faisons de nos écoles des lieux d’exemplarité de la lutte contre les déchets. Retrouvez cette initiative sur les réseaux sociaux via le #ecolezerodechet.
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Un composteur, c’est un bac (en bois ou en plastique) où l’on jette tous les déchets organiques. Grâce au travail des micro-organismes et des « petites bêtes », tous ces déchets se transforment, en quelques semaines, en compost, un engrais totalement naturel. Le composteur, c’est donc une boite magique : on y met des déchets et on en ressort de l’engrais.
Oui, d’accord, mais quel rapport entre l’école et le compost ? Pourquoi certains enseignants et/ou animateurs prennent-ils le temps de mettre ce dispositif en place ? Quels bénéfices en tirent-ils pour les apprentissages ? Quels en sont les apports pédagogiques ? Outre le travail scientifique sur les déchets et la faune du compost, la mise en place d’un composteur est l’occasion d’interroger les élèves sur le gaspillage alimentaire et de mettre en œuvre une vraie démarche collective de projet, les incitant à une transition écologique et sociale.
Concrètement, comment installer et entretenir ce composteur ? Et comment faire quand on manque d’espace ? Les Profs en Transition partagent leurs expériences.
Le composteur, objet d’études scientifiques
Avant d’installer un composteur de leur établissement, les enseignants ont souvent mené un travail préparatoire sur les déchets. L’objectif pédagogique est double : connaître les caractéristiques de la matière et éveiller à la protection de l’environnement.
En s’appuyant sur l’observation de déchets ramassés lors d’une sortie par exemple, les élèves peuvent être invités à caractériser et identifier chaque matière. Cela conduit naturellement au tri des déchets, avec de nombreux prolongements possibles : les différentes poubelles, le parcours des déchets, le cycle de matière, la course au tri, etc. Cela est souvent l’occasion de mettre en place le tri et les collectes solidaires (piles dont projet Piles Solidaires, mais aussi ampoules, bouchons, stylos, etc. et compost évidemment). De nombreuses ressources pédagogiques sont disponibles sur internet pour aborder ces questions essentielles en classe, notamment autour des biodéchets :
– programme pédagogique de prévention des biodéchets “Réduire mes déchets, nourrir la terre”
– sélection de ressources autour de la thématique “Consommation et déchets” proposée par la fondation La Main à la Pâte.
Les élèves peuvent également s’exercer à la démarche scientifique en expérimentant la dégradation des déchets. On peut ainsi parler de :
– la dégradation des déchets organiques : comparer la dégradation de déchets organiques hors sol (dans un bocal) et sur le sol. L’excellent épisode de l’émission “C’est pas sorcier” consacré aux vers peut alors être un apport utile.
– la dégradation des différents types de déchets dans la nature.
Cette étape, précédant l’installation du composteur, s’avère nécessaire pour donner du sens à la mise en place de cet outil de réduction des déchets, mais également pour éviter les erreurs lors de dépôt des déchets dans le bac à compost.
Une fois le composteur installé, les apprentissages se poursuivent. L’étude des « petites bêtes » qui l’habitent donne l’occasion de traiter de la biodiversité et de son rôle indispensable dans l’équilibre de l’écosystème. Cette étude peut être réalisée à travers différents domaines et de très nombreuses activités :
– en sciences : observation, dessin d’observation, classification, jeux des différences/ressemblances… selon l’âge et le niveau des élèves ;
– en projets interdisciplinaires : réalisation d’une exposition ou d’un livre à compter, d’un imagier, d’un répertoire de la biodiversité du compost, fabrication d’un jeu (mémory, loto…), etc.
Le composteur, outil de prise de conscience
Certain.e.s enseignant.e.s ont profité, en partenariat avec les cantines, de la mise en place d’un composteur pour mettre en évidence aux yeux de leurs élèves la quantité de nourriture jetée quotidiennement. De là a pu émerger une prise de conscience sur le gaspillage alimentaire. Cela a ensuite ouvert à des débats et des recherches. Des affiches supports ont été regroupées sous notre tableau Pinterest. Les élèves ont pu ainsi mettre en place des solutions qu’ils avaient eux-mêmes proposées pour réduire ce gaspillage au sein de leur établissement.
Cette démarche peut se poursuivre par une réflexion, plus générale, sur la consommation, et ses répercussions que ce soit en terme de déchets (la méthodologie des 5R) que sur le climat (des outils sont disponibles sur cette thématique centrale sur notre article dédié pour aborder ces questions délicates avec vos élèves).
Le composteur, base de projet collaboratif
De nombreuses expériences rapportent que le composteur a été l’occasion de créer des liens et une collaboration entre élèves. Il est, par exemple, possible d’installer des collecteurs dans chaque classe et de demander aux plus grands de faire le tour des classes en fin de semaine pour apporter l’ensemble au composteur ; ou bien de créer une nouvelle responsabilité au sein de la classe de « responsable du composteur ».
Dans certains établissements, les familles sont mises à contribution et inviter à apporter leurs déchets organiques (à tour de rôle ou quotidiennement selon la taille et le milieu de l’établissement). Cela permet une meilleure inclusion des familles dans les établissements et la scolarité de leurs enfants, tout en les sensibilisant à des écogestes essentiels.
Enfin, le composteur, par sa production d’engrais naturel intarissable, est également l’occasion d’un réinvestissement dans la réalisation d’un jardin ou d’un potager collaboratif. Là encore, tout semble possible : le jardin peut être situé dans l’établissement ou dans un espace extérieur, ouvrant à un partenariat et une solidarité nouvelle.
A travers tous les échanges qui ont lieu sur le groupe Profs en Transition, les enseignant.e.s sont unanimes : le composteur a été bien accueilli par tous les acteurs : élèves (souvent fiers de leurs actions écologiques), collègues et agents d’entretien. Il offre de nombreuses sources d’apprentissages, tant sur les savoirs scientifiques que le savoir-être de citoyen éco-responsable.
Convaincu.e.s ?
Alors comment faire ? Comment mettre en place un composteur dans votre établissement ? Comment l’alimenter ? Comment l’entretenir ? Les Profs en Transition partagent leurs expériences.
Mettre en place un composteur
Au préalable, il est nécessaire de récupérer cette fameuse boite magique, le composteur. Certain.e.s enseignant.e.s l’ont obtenu gratuitement auprès de la mairie, de leur agglomération ou du syndicat de gestion des déchets. Il arrive parfois que ces fournisseurs interviennent même dans l’établissement pour mettre en place et présenter le composteur aux élèves. D’autres collègues ont construit eux-mêmes le composteur, parfois, et c’est l’idéal, avec leurs élèves, grâce à des modes d’emploi trouvés sur internet (ici par exemple). Cependant, la difficulté de la mise en place du composteur ne tient pas à son installation, mais plutôt à son entretien.
Pour obtenir un engrais naturel de qualité, les déchets placés dans le composteur doivent bien entendu être des déchets organiques, mais ils doivent également être apportés dans des proportions équilibrées.
Il est important de présenter aux élèves et aux équipes les déchets qui peuvent être mis au composteur :
– des déchets verts (feuilles, pelouse, fleurs fanées, déchets de cuisine tels que épluchures, restes alimentaires…),
– des déchets bruns (cartons, mouchoirs en papier…).
Les déchets d’origine animale ne sont pas conseillés car ils risqueraient d’attirer des rats ou d’autres animaux indésirables dans un établissement scolaire.
Ces déchets verts et bruns doivent être apportés en quantité à peu près égale afin qu’ils puissent efficacement être transformés en compost. Avec trop de déchets verts, le compost sera trop humide et risque de pourrir avant de se dégrader, en dégageant une odeur peu agréable ; avec trop de déchets bruns, le compost sera trop sec et ne se dégradera pas.
Des affiches pourront utilement être réalisées et accrochées pour rappeler ses informations autour du compost ou dans les lieux de récupération des déchets (à la cantine, dans la salle des maitres, dans les cahiers de liaison pour solliciter les familles par exemple). Outre le travail que permet cette réalisation, ces affiches sont indispensables pour la réussite du compost et donc l’aboutissement du projet. En voici quelques exemples portés sur notre tableau Pinterest.
En plus de l’alimentation du composteur, il est nécessaire de veiller à ce qu’il soit correctement aéré. Pour cela, les déchets devront être régulièrement retournés. Les membres de Profs en Transition évoquent différents outils : fourche, pelle, ” brass’compost ” ou même ” flèche de compost “. Les plus grands pourront procéder eux-mêmes à cette aération.
Au-delà de tout cela, pour que la mise en place et l’entretien du composteur se révèlent un projet de transition et d’apprentissages efficaces, des partenariats sont indispensables. Que ce soit avec la mairie, le syndicat de gestion des déchets, le périscolaire, la cantine ou même les familles des élèves, les partenariats seront nécessaires pour alimenter le composteur, mais aussi pour l’entretenir pendant les vacances scolaires et pour donner une dimension plus large au projet, ouvrant l’établissement scolaire vers l’extérieur. Et pour détendre un peu tout le monde au sujet du composteur, rien de tel qu’une petite chanson, pédagogique évidemment !
Manque de place ? Une solution : le lombricomposteur
Dans certains établissements, les espaces extérieurs ne se prêtent pas à la mise en place d’un composteur (manque de place ou d’espaces verts). Il est alors possible d’installer un lombricomposteur. Le principe est identique : on y met des déchets et on récupère de l’engrais. La particularité du lombricomposteur est qu’il s’agit d’une boite fermée contenant des vers rouges, qui feront le travail de dégradation et de transformation des déchets. Sans odeur et clos, il peut être installé en intérieur.
Le lombricomposteur fournit, en plus du compost, un engrais liquide très efficace (tellement concentré qu’il doit être dilué à 10 % pour être utilisé). Certains enseignants et/ou animateurs choisissent même de n’utiliser qu’un lombricomposteur, facilement observable et transportable pour étudier la dégradation des déchets organiques. Pour la mise en place, certains collègues se le sont procurés via des partenaires institutionnels (mairie ou agglomération). D’autres, plus bricoleurs, les ont fabriqués eux-mêmes (grâce à des tutoriels, comme celui proposé ici ).
Si dans un composteur les micro-organismes et les « petites bêtes » s’installent seuls, dans un lombricomposteur, c’est à nous de les accueillir et de les installer. Pour cela, il est possible soit d’en acheter, soit de faire appel à la générosité de personnes ayant elles-mêmes un lombricomposteur avec suffisamment de lombrics pour en donner. Le site plus2vers est une mine d’informations autour du lombricompostage. Une fois bien installés dans le lombricomposteur de la classe, les vers vont se reproduire et la classe pourra à son tour donner des vers pour permettre à une autre personne de commencer à composter à domicile, nourrissant ainsi la solidarité indissociable de la transition sociale.
Pour conclure
Au-delà des apprentissages scolaires qu’il permet d’aborder, le composteur est donc également un formidable outil pour transmettre à nos élèves des gestes écoresponsables et des valeurs de transition sociale et écologique. C’est sans aucun doute pour cette raison que le compostage est ainsi souvent abordé sur notre groupe Facebook. Voici sur cette page l’exemple de mise en place d’un compost à l’école. Egalement, la mise en place d’un composteur s’inscrit pleinement dans la démarche de la refonte de nos cours de récréation dont nous vous avions parlée sur cet article dédié.
Enfin, de nombreux albums, contes, chansons, sites… abordent le compostage. En voici une petite sélection, spéciale Profs en Transition :
– « Tout pourrit » de Hirotaka Nakano (album illustré pour des élèves de 3 à 6 ans).
– « Twist le lombric » de Flora Bernard et Pierre Cornuel (album illustré pour des élèves de 3 à 6 ans)
– « Eric le lombric » (chanson de Pascal Genneret)
Pour partager notre expérience autour du compost à l’école et des nombreux autres sujets de la transition, retrouvez-nous sur notre groupe Facebook !
Merci à Ade Line, notre super modératrice et ici journaliste pour cet article !
3 commentaires
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Jean Paul Paul Nourrit
Bonjour,
Félicitations pour votre implication dans cette belle pédagogie. De notre côté, nous apportons notre pierre pour cette transition.
Connaissez vous http://mesdechets.passerelles.info/, avec lesquels nous collaborons depuis 14 ans en plus de plein d’autres choses ‘voir notre blog)?
Restant à votre disposition
Jean Paul Nourrit
Gérant
Lombricomposteur
Belle publication ! Merci de partager votre expérience en espérant que d’autres se lancent.